L'année dernière, la Banque d'Angleterre a ouvertement admis que les banques privées sont responsables de la création, à partir de rien, de la plus grande partie de la masse monétaire. Ceci est important, parce que même si la vérité à propos de la création d'argent par les banques a circulé dans les tribunes publiques au cours des cent dernières années (en grande partie grâce aux efforts de Clifford Hugh Douglas et d'autres), certains banquiers et économistes ont nié cette réalité tandis que d'autres, comme Reginald McKenna, ont été tout à fait francs et ouverts à ce sujet.
À la réunion annuelle des actionnaires de la Midland Bank, le 25 janvier 1924, Reginald McKenna, président de cette banque, a donné un compte rendu clair et succinct du processus de la création du crédit:
«La quantité d’argent en existence varie seulement avec l’action des banques, en augmentant ou en diminuant les dépôts. Nous savons comment cela se fait. Tout prêt de la banque et chaque achat de titres de la banque créent un dépôt, et chaque remboursement d’un prêt bancaire et chaque vente de titres détruisent un dépôt.»
Même aujourd'hui, il y a beaucoup de gens, y compris de nombreux hommes politiques, qui sont parfaitement inconscients et/ou gravement mal informés au sujet de l'origine de notre offre de monnaie.
Dans le document de 2014 de la Banque d'Angleterre, Money Creation in the Modern Economy (La création de la monnaie dans l'économie moderne), les faits pertinents sont présentés comme suit dans cette étude:
Dans l'économie moderne, la plus grande partie de l'argent prend la forme de dépôts bancaires. Mais la façon dont ces dépôts bancaires sont créés est souvent mal comprise: le moyen principal est par les banques commerciales qui accordent des prêts. Chaque fois qu'une banque accorde un prêt, elle crée simultanément un dépôt correspondant dans le compte bancaire de l'emprunteur, créant ainsi de nouveaux fonds.
Chaque fois que les banques font des prêts, c'est-à-dire, chaque fois qu'elles achètent des reconnaissances de dettes des entreprises, des gouvernements ou des individus, ou achètent des titres, ou payent leurs propres frais d'opération, elles créent de nouveaux fonds sous la forme de crédit bancaire. Ce crédit bancaire existe sous la forme de nombres électroniques impalpables. Dans un pays industrialisé typique, 95% ou plus de la masse monétaire existe sous forme de crédit bancaire, et la plupart de ce crédit est créé avec un volume correspondant de dette avec intérêt. Seulement 5% de l'argent existe sous forme de billets et de pièces.
La création par la banque de la majeure partie de notre masse monétaire est quelque chose qui devrait être ouvertement admise par les banques, et qui devrait faire partie de la connaissance générale de la population. Il faut le répéter: les banques ne prêtent pas les dépôts des autres personnes, des autres clients de la banque. Au lieu de cela, chaque prêt et chaque achat bancaire créent un dépôt, de l'argent nouveau.
Maintenant, il est facile, sur la base de cette révélation surprenante, de croire que le principal problème avec le système financier actuel est la réalité brutale que les banques créent 95% de la masse monétaire ex nihilo, à partir de rien. Du point de vue du Crédit Social, cependant, cet état de choses ne devrait pas être le centre de notre préoccupation. Après tout, quelqu'un, que ce soit les banques, l'Etat, ou les banques en collaboration avec l'Etat, doit créer la masse monétaire. Le principal problème avec le système actuel concerne les conditions dans lesquelles notre argent est créé, mis en circulation, et rappelé (cancellé). En d'autres mots, la question principale est: qui contrôle la masse monétaire, et à quelles fins?
Dans le système actuel, la masse monétaire est largement contrôlée par les banques privées, et les conditions de sa création, de son émission et de son rappel servent les intérêts des financiers au détriment des intérêts légitimes des consommateurs.
La solution à cette domination privée de la masse monétaire n'est pas de remplacer le monopole des banques privées par un monopole total de l'État sur la création d'argent. Avec un tel monopole, l'État pourrait, tout comme les banques commerciales, aussi facilement créer, émettre, et rappeler l'argent pour servir les intérêts d'une élite oligarchique qui aurait pris le contrôle de l'État si d'autres conventions financières et économiques n'étaient pas changées. Avant tout, ce sont les conditions qui régissent le fonctionnement de la masse monétaire qui doivent être modifiées en faveur de l'individu.
Dans un système monétaire honnête, c'est-à-dire, un système qui reflète fidèlement les réalités, les consommateurs dicteraient, par leurs achats ce que l'économie produirait, et pourrait ainsi contrôler directement ou indirectement, au moyen d'un Office National de Crédit, les conditions de la création monétaire, son émission et son rappel, de façon à veiller à ce que le bien commun soit correctement promu.
Quelle est cette politique alternative que le système financier (c'est-à-dire les systèmes bancaires et de la comptabilité des coûts) devrait servir? Réponse: La livraison effective des biens et services désirés par la population, avec le moins d'efforts et de dépenses de ressources possibles.
À l'heure actuelle, le consommateur a tendance à recevoir le moins de biens et de services possibles en échange de la plus grande quantité d'efforts et de dépenses de ressources possibles. Jusqu'à ce que l'objectif actuel du système économique soit remplacé par une politique en faveur des consommateurs, il ne peut y avoir de véritable démocratie économique, ni non plus de démocratie politique réelle.
Le fait que les banques créent l'argent qu'elles prêtent à partir de rien a été admis par un certain nombre d'autres éminents banquiers au cours du 20e siècle. Voici deux autres exemples:
Réponses de Graham F. Towers, gouverneur de la Banque du Canada de 1934 à 1955, aux questions posées par M. Gerry McGeer au cours de la réunion du 3 mai 1939 du Comité parlementaire canadien des banques et du commerce:
Q. Mais il n’y a pas de doute que les banques créent elles-mêmes ce moyen d’échange?
Towers: C’est exact. C’est pour cela qu’elles existent... C’est là le rôle des banques, tout comme une aciérie fabrique de l’acier. (p. 287) Chaque fois, et à toutes les fois qu’une banque accorde un prêt (ou achète des titres), du nouveau crédit bancaire se trouve créé, de nouveaux dépôts, de l’argent flambant neuf. (p. 113 et 238) Généralement parlant, toute nouvelle monnaie vient d’une banque sous forme de prêts. Tout l’argent en circulation a été à son origine prêté par une banque. (p. 461 et 794) Puisque tous les prêts sont des dettes, alors sous le système actuel, toute monnaie est une dette. (p. 459) C’est une erreur commune de croire que les banques prêtent l’argent de leurs déposants. Elles ne le font pas du tout. (p. 398, 455, 590)
Q. Alors nous autorisons les banques à émettre un substitut à la monnaie?
Towers: Oui, je crois que c’est un exposé très juste de cette fonction de la banque. (p. 285)
Q. 12 pour cent de la monnaie en usage au Canada est émise par le gouvernement par l’hôtel des monnaies et la Banque du Canada, et 88 pour cent est émis par les banques commerciales du Canada sur les réserves émises par la Banque du Canada ?
Mr. Towers: Oui.
Q. Pourquoi un gouvernement ayant le pouvoir de créer l’argent devrait-il céder ce pouvoir à un monopole privé, et ensuite emprunter ce que le gouvernement pourrait créer lui-même, et payer intérêt jusqu’au point d’une faillite nationale?
Towers: Si le gouvernement veut changer la forme d’opération du système bancaire, cela est certainement dans le pouvoir du parlement. (p. 394)
Et terminons avec cette citation de Robert H. Hemphill, ancien directeur du crédit de la Banque fédérale de réserve d’Atlanta, dans son avant-propos au livre de 1935 d’Irving Fisher, 100 % Money:
«Si tous les prêts bancaires étaient remboursés, personne ne possèderait de dépôt bancaire, et il n'y aurait pas un seul dollar en circulation. Ceci est tout à fait stupéfiant: nous sommes complètement dépendants des banques commerciales. Quelqu'un doit emprunter chaque dollar que nous avons en circulation, que ce soit un billet de banque ou sous forme de crédit. Si les banques créent suffisamment d'argent, nous sommes prospères; sinon, nous mourons de faim. Nous sommes absolument sans système monétaire permanent. Quand on comprend toute la situation, l'absurdité tragique de notre situation désespérée est presque incroyable – mais elle est réelle.»